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HUMANS OF EM - RAPHAËL BAZOT

Dernière mise à jour : il y a 3 jours


Peux-tu te présenter ? 


Je m’appelle Raphaël Bazot, je suis arrivé à l’EM en 2000, après deux ans de prépa au lycée Lavoisier, à Paris. Je suis sorti de l’emlyon en 2004. J’ai toujours travaillé dans le marketing, en particulier dans le luxe et la joaillerie. J’ai vécu et travaillé à Paris, Genève, Amsterdam, j’ai travaillé chez L’Oréal, Cartier, Chaumet, De Grisogono… Aujourd’hui, je suis indépendant, je fais du commerce de bijoux vintage, je donne des cours en Suisse, et surtout, j’écris une méthode de marketing inspirée du positivisme, une philosophie du XIXe siècle.



Raphaël Bazot - Président du Raid 2002
Raphaël Bazot - Président du Raid 2002

Pérenniser une jeune asso à 20 ans : mission impossible ?


Oui ! Je suis entré au Raid en 2001, et c’était loin d’être gagné. La Corpo est venue me voir en début d’année : en dépit du travail titanesque des deux premières équipes, l’association était en difficulté financière, les comptes étaient dans le rouge. Ils envisageaient de la reprendre en main. J’ai pu les convaincre de ne pas le faire. C’était une des premières fois de ma vie où j’ai eu la chance de pouvoir me battre pour quelque chose de plus grand que moi, et ça m’a marqué. On a gardé notre indépendance, mais ça nous a mis une énorme pression : “Si vous foirez, il n’y aura plus de Raid l’année suivante.” On s’est lancés dans une année de dingue, tous ensemble. On avait une équipe énorme : deux promos, des bénévoles, des professionnels. Le budget ? 300 000 à 350 000 euros. Au final, les difficultés financières n’ont pas totalement disparu mais nous avons eu un beau succès médiatique et nos successeurs ont été formidables, assainissant progressivement les comptes



Comment conciliais-tu cela avec l’emlyon ?


En tant que président, j’avais un aménagement de scolarité extrême : en 2e année, au dernier trimestre, j’avais deux heures de cours par semaine, uniquement de l’anglais. J’ai passé l’année à faire du démarchage : ville de Lyon, aéroport, partenaires italiens à Turin… Nous nous sommes tous sincèrement investis, et, au final, on a réussi. L’arrivée à Turin reste un souvenir fort : tout le monde en larmes, on s’était donnés à fond, et ça a soudé des amitiés pour la vie.



Comment était la vie associative à ton époque ? 


C’était vraiment une autre époque. Moins structurée, plus libre, plus sauvage, aussi bien pour le meilleur que pour le pire. On pouvait fumer partout, il y avait des cendriers dans les toilettes ! Chaque semaine, des happy hours sur le campus et des soirées open bar dans des boites lyonnaises privatisées. Et une foule d’évènements géniaux organisés par les différentes assoces. Il y avait une grande proximité entre les tous les membres d’associations, et nous étions même physiquement réunis dans un « couloir des assoces », au milieu du bâtiment principal. J’ai listé Petit Paumé. J’étais président de ma liste, et on a perdu de très peu. Une vraie claque. Trois mois d’investissement à fond, jour et nuit, et tout se joue sur un vote. C’est marquant.



Peux-tu nous expliquer comment fonctionnaient les chefs pipos et chefs pipettes ? 


À l’époque, les coachs n’existaient pas. Le système, c’était les pipos (garçons) et pipettes (filles), qui étaient les anciens de toutes les assos. On accompagnait les campagnes, mais c’était aussi un grand jeu. Il y avait un vocabulaire : les “croutés” (listeux), les “pipos/pipettes”, les kidnappings… En 2e année, j’étais pipo pour le Ski Club, notre groupe s’appelait Travelots Public. En 3e année, pipo BDE, on s’appelait les Fuckters. C’était l’âge d’or des jeu de mots pourris et des déguisements et de l’autodérision. On avait des chorées, des bouquins de présentation, des week-ends entiers à organiser pour les listeux.



Comment étaient organisées les épreuves ?


Pendant trois mois, en tant que pipo ou pipette, on organisait des épreuves, souvent absurdes, parfois brillantes. On avait carte blanche. Par exemple :


  • Un parcours dans Lyon toute une nuit, où les listeux couraient d’indice en indice. À la fin, il ne se passait… rien. Et 4 h plus tard, on débarquait pour les réveiller.

  • Kidnapping au cinéma : on interrompait la séance, on montait sur scène, on embarquait des listeux puis on les mettait dans un train les yeux bandés, en leur faisant croire qu’ils partaient à Paris. Ils descendaient à la Part-Dieu.


L’objectif était de créer des souvenirs, avec bienveillance. Ce n’était pas censé être du bizutage, même si certains groupes dépassaient parfois les limites. Le système dépendait beaucoup de la personnalité des pipos et pipettes.



Comment es-tu passé du Raid à une carrière en marketing ?


Je faisais le tour des stands avec mon discours bien rodé. J’arrive chez L’Oréal, je commence à pitcher… Et la dame me coupe, me dit texto : « Ton truc est sympa, mais ça ne m'intéresse pas. Par contre, viens passer un entretien pour un stage en marketing. »

De la manière la plus improbable : totalement par hasard. Pendant ma deuxième année à l’EM, je participais à un forum entreprises, mais pas pour chercher un stage. J’étais là pour trouver des sponsors pour le Raid Hannibal. Je faisais le tour des stands avec mon discours bien rodé. J’arrive chez L’Oréal, je commence à pitcher… Et la dame me coupe, me dit texto : « Ton truc est sympa, mais ça ne m’intéresse pas. Par contre, viens passer un entretien pour un stage en marketing. » Je n’avais aucune idée de ce qu'était le marketing. Mais je me suis dit : pourquoi pas ? Et c’est comme ça que j’ai atterri chez L’Oréal Luxe, sur la marque Armani. Premier projet : le développement d’un parfum Emporio.



Quelle a été ton expérience du secteur de la grande consommation ? 


Après ce premier stage, j’en ai cherché un second, un peu plus opérationnel, toujours en marketing, cette fois dans la grande conso. J’ai été pris chez Kraft Foods, devenu aujourd'hui Mondelez. C’était un géant du secteur agroalimentaire. J’étais assistant chef de produit sur les chocolats. C’était très formateur. La grande distribution, c’est le temple du marketing analytique. Tout est millimétré : chaque promotion a un impact prévisible sur les ventes. On pouvait modéliser à l’avance l’effet d’un bon de réduction placé à tel endroit dans le rayon : +1,7 point de part de marché. C’est fascinant… et inquiétant aussi. Je me suis dit : « En fait, on est tous hyper prévisibles ». Cette expérience m’a marqué et m'a poussé à la réflexion. Elle m’a donné une forme de lucidité : j’ai vu à quel point le marketing peut être une machine puissante, mais aussi impersonnelle. C’est là que j’ai commencé à développer un certain recul.



Comment as-tu trouvé ton premier CDI dans l’horlogerie de luxe ?


Encore une fois, tout est parti d’un coup de fil. Je galérais comme tout le monde, à envoyer des candidatures un peu partout. Et là, un pote du Petit Paumé me contacte : « Ma boîte à Genève cherche quelqu’un. Postule ! » Je tente ma chance. Je suis pris. Me voilà chez Baume & Mercier, chez Richemont. Une boîte à taille humaine, ambiance familiale, mais avec les moyens d’un grand groupe. On est en plein boom du luxe, avant la crise : tout le monde est jeune, motivé, on bosse dur, mais on s'amuse aussi énormément. Il y avait des séminaires de folie, des événements grandioses… Comme une petite prolongation de l’EM : intense, festif, collectif.



Mais alors, pourquoi tout quitter ? 


Parce qu’une petite voix me soufflait : “Tu peux créer quelque chose à toi.” Je repensais à l’année du Raid, à ce sentiment puissant de construire ensemble. Alors j’ai tout plaqué, je suis retourné chez mes parents, et j’ai lancé un projet : WAP, une marque de vêtements un peu streetwear, un peu engagée, avec des valeurs écologiques et sociales. On voulait produire localement, s’inspirer de ce que faisait American Apparel à l’époque. J’ai embarqué trois potes. J’ai commencé à les convaincre de tout quitter. Et puis… j’ai flanché. Trop d’inconnues, trop de responsabilités. La prod textile ? Je ne connaissais pas assez. J’ai eu peur. Et j’ai tout arrêté, avant de les entraîner avec moi.



Et finalement, LVMH ?


Oui, après deux nouvelles expériences dans le luxe, je rejoins Chaumet, maison du groupe LVMH, où je reste cinq ans. Je suis un passionné de joaillerie et d’horlogerie et j’ai la chance alors de gérer avec une équipe extraordinaire : le marketing de la joaillerie, de l’entrée de gamme à la haute joaillerie de la place Vendôme. Un univers exigeant, ultra formateur, et franchement fascinant. Lancements de collections, montée en puissance de la marque, fashion weeks, shootings, salons internationaux… Mais malgré tout, une envie perdurait. Pas liée au poste, ni au salaire. Quelque chose de plus intime : le désir d’explorer, de faire un pas de côté, de relever de nouveaux défis et d’ajouter du sens.



Et tu as tout quitté à nouveau ?


Oui, j’ai eu l’opportunité de négocier un départ avantageux et ainsi pouvoir me consacrer à des projets personnels. Mais cette fois, c’était différent. J’avais une famille, quatre enfants. Je savais que ce ne serait pas simple… Je redeviens indépendant, je me lance dans deux créations de marques joaillières. Je réalise progressivement qu’au-delà de la création d’entreprise en elle-même, je souhaite surtout challenger le milieu dans lequel j’évolue, et essayer d’apporter ma très modeste contribution au progrès collectif.. Je me mets à lire Auguste Comte, à explorer le positivisme, avec ses forces et ses faiblesses, et une idée me vient : « Et si on appliquait ça… au marketing ? ».



Pour conclure, quels conseils donnerais-tu aux étudiants qui s’apprêtent à entrer dans le monde professionnel ?


Postulez partout, soyez prêts à bouger, et surtout acceptez le premier boulot même s’il n’est pas parfait. C’est souvent là qu’on apprend le plus. Il faut être humble, montrer sa motivation, et ne pas se décourager.

Le conseil le plus important, c’est d’être ouvert et flexible. Il ne faut pas se bloquer sur un plan rigide ou un secteur précis dès le départ. Postulez partout, soyez prêts à bouger, et surtout acceptez le premier boulot même s’il n’est pas parfait. C’est souvent là qu’on apprend le plus. Il faut être humble, montrer sa motivation, et ne pas se décourager. Ensuite, profitez à fond de votre temps à l’EM Lyon, investissez-vous dans la vie associative. Créez des liens vrais avec les autres étudiants, parce que c’est ce réseau humain qui sera votre plus grande force. Ces amitiés sincères vous aideront toute votre vie, autant dans vos projets professionnels que personnels. Je crois aussi que c’est important d’avoir un plan, mais d’être prêt à rebondir. La vie n’est jamais un long fleuve tranquille. Ce qui m’a aidé, c’est aussi cette énergie que j’ai puisée dans mes expériences associatives et les relations humaines. L’emlyon, c’est vraiment un moment pour vivre à fond, pour créer des amitiés durables et pour se découvrir.




 
 
 

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